Les attitudes à l'égard de l'utilitarisme restent aujourd'hui contradictoires. On accuse depuis longtemps le monde moderne de sacrifier à la seule valeur d'utilité et de mépriser, en son nom, la vérité, la justice, le bien et surtout la beauté. On soupçonne que l'utilité vassalise l'ensemble des valeurs, comme l'a remarquablement détecté Hegel qui a vu, dans l'utilité, un tournant du monde moderne. Mais, en même temps, on n'accepterait pas de faire un travail inutile ou de voir sa personne ou ses actes taxés d'inutiles. Dès lors, y a-t-il une mesure qui puisse, de l'extérieur, contenir l'utilité ? Ou ce processus de limitation ne peut-il se fonder que de l'intérieur ? Ce dernier défi est celui que l'utilitarisme lance aux autres philosophies, sur tous les fronts, théoriques et pratiques.