La rééducation des patients atteints de lésions cérébrales relève d’un défi pour les professionnels et la collectivité. Ce soin réalisé à la limite, comme le montrent les nombreuses situations cliniques, requiert une vigilance éthique renforcée.
Le patient atteint de lésions cérébrales sévères, suite notamment à un traumatisme crânien ou un accident vasculaire cérébral, requiert une rééducation spécialisée. Ces soins s’inscrivent dans une démarche pluridisciplinaire, visant à préparer un sujet vulnérable à la meilleure qualité de vie possible malgré des limitations physiques, fonctionnelles, psychiques et cognitives. Il s’agit d’aider le patient à donner sens à cette nouvelle allure de vie imposée.
L’auteur s’appuie sur sa pratique de médecin gériatre spécialisé en réadaptation afin d’éclairer les particularités des pratiques. L’approche éthique et humaniste qu’il propose a pour ligne d’horizon le juste soin prodigué au sujet dont la vulnérabilité est extrême. De nombreuses situations cliniques sont présentées. Le contexte souvent brutal de la survenue d’un traumatisme, la brusque dégradation de l’état d’un patient cérébrolésé nécessitent des choix difficiles, aux limites de l’engagement premier des soignants. Le médecin de garde appelé en urgence est ainsi conduit, entre autres, à prendre des décisions pour des patients qui ne sont pas forcément en fin de vie, à s’enquérir de directives anticipées formulées bien en amont de la situation actuelle, ou des demandes de limitation et d’arrêt de traitement n’émanant parfois que de la famille. Le soin à la limite peut alors engendrer des actes de désobéissance. Désobéir, c’est ici juger en situation. Une telle pratique raisonnée est éthique lorsqu’elle sert les intérêts du sujet en état limite, est étayée sur la responsabilité envers l’autre comme soi-même, qui nous oblige. Le vieillissement de la population et les progrès médicaux ont par ailleurs pour conséquence une incidence accrue de pathologies considérées comme lourdes et coûteuses. Cette réalité des contraintes économiques pèse sur les choix, mais aussi parfois sur le devenir des patients cérébrolésés. De tels enjeux financiers peuvent alors constituer une limite du soin.
La rééducation des patients atteints de lésions cérébrales relève d’un défi pour les professionnels, l’institution et la collectivité. Ce soin réalisé à la limite bouscule les soignants et requiert une vigilance éthique renforcée.