L’empire de la valeur
La crise financière a révélé au grand jour les limites de la théorie économique : celle-ci n’a su ni prévoir les désordres à venir, ni même mettre en garde contre de possibles instabilités. Cet aveuglement est le signe d’un profond dysfonctionnement qui exige un renouvellement radical des méthodes et des concepts, au premier rang desquels celui de valeur économique.
Les économistes conçoivent la valeur, que ce soit celle des marchandises ou celle des titres financiers, comme ayant la nature d’une grandeur objective qui s’impose aux acteurs et à leurs interactions, à la manière d’une force naturelle. Or il n’existe pas une juste valeur, ni pour les marchandises, ni pour les titres, mais différents prix possibles en fonction des intérêts et des croyances. À partir de ce nouveau cadre d’analyse, c’est toute la science économique qu’il s’agit de refonder.
André Orléan
Directeur de recherche au CNRS et directeur d'études à l'EHESS, il est notamment l'auteur de La Monnaie souveraine (avec Michel Aglietta, Odile Jacob, 1998) et de De l'euphorie à la panique : penser la crise financière (Éditions Rue D’Ulm, 2009).