Traduit de l'anglais (États-Unis) par François Lasquin.
« Il s'apprêtait à allumer une cigarette avec sa dernière allumette, mais ses mains se mirent à trembler. L'allumette s'éteignit et il resta là, tenant sa cigarette d'une main et sa pochette d'allumettes vide de l'autre, fixant d'un oeil vide la forêt qui s'étalait à l'infini à l'extrémité de la prairie d'un vert cru - Harry, il faut qu'on s'aime, dit Emily. Il ne nous reste plus qu'à nous aimer, dit-elle. »
Nous sommes en 1976. Carver va très mal. Son mariage avec Maryann bat de l’aile, les problèmes d’argent s’accumulent, et, en dépit de ses efforts répétés pour vaincre son addiction (cures de désintoxication, adhésion aux Alcooliques Anonymes), l’écrivain semble s’enfoncer irrémédiablement dans l’alcoolisme. Gordon Lish, qui a déjà édité plusieurs de ses nouvelles dans Esquire et vient d’être nommé directeur de collection chez McGraw-Hill, lui propose un contrat.
En mars, Tais-toi, je t’en prie ( Will You Please Be Quiet, Please ? ) paraît en librairie. C’est le premier recueil de nouvelles publié par Raymond Carver, ses vrais débuts.
Le succès n’est pas encore au rendez-vous, mais le livre fait grosse impression, notamment sur le jury du National Book Award (il sera finaliste, mais devra s’incliner devant Wallace Stegner).
Quelques mois plus tard, en 1977, Carver fait deux rencontres de première importance. Un jeune écrivain, Richard Ford, vient de publier son premier roman, Une mort secrète ( A Piece of My Heart). Il demeurera son ami le plus proche pendant les dix années à venir. Carver fait aussi la connaissance de Tess Gallagher. Une des périodes les plus difficiles de sa vie est en train de s’achever.