« Je n'aurai plus jamais faim, me suis-je dit. Il était sept heures du soir et j'avais faim. Sur la table de la cuisine, contre le mur, le gâteau aux noix rayonnait. La cuisine était dans l'ombre, le chocolat glacé brillait. Une roue noire piquetée de demi-noix parfaites, blanches, absolument pas tachées de chocolat. Je lui ai dit adieu pour toujours. j'avais treize ans et fini de grandir. Je ne grandirai plus, m'étais-je dit. Je ne mangerai plus que le minimum. Ce qu'il faut pour durer. Cela faisait comme un champ d'exploration immense, la découverte d'un territoire sauvage et secret.
Je n'avais aucun secret. »
Nouk est anorexique. C'est ainsi qu'on nomme sa maladie. Mais la souffrance, comment la nommer ? Le plus grave, c'est peut être le plaisir inavouable d'être la plus forte, et de mentir, mentir, mentir, jusqu'au vertige. Un jour, Nouk est enfermée dans une clinique où l'on s'applique, méthodiquement, à la casser. La jeune fille semble se soumettre. Mais elle reste indomptée. Si elle guérit, ce sera par d'autres voies.
Avec ce roman pur et violent, Geneviève Brisac obéit à une seule exigence : celle de dire la vérité, quoi qu'il en coûte.