La Philosophie et le Miroir de la nature (1979), maître ouvrage du philosophe Richard Rorty, constitue un tournant majeur de la pensée du xxe siècle. Il propose une critique ambitieuse et audacieuse de la conception « spéculaire » de l’esprit humain, de la connaissance et de la philosophie, conception qui s’initierait à l’époque de Descartes et Locke et se perpétuerait jusque dans les principaux courants de la philosophie contemporaine, notamment dans la philosophie analytique. Penser l’esprit comme le « miroir » de la nature, la connaissance comme la production de « représentations privilégiées » du monde et la philosophie comme une « théorie générale de la connaissance », telles seraient les trois étapes d’une même tendance conduisant au « gel » de la culture occidentale et à l’oubli de la contingence des jeux de langage, de la diversité des paradigmes de la vie humaine et de la richesse des versions alternatives du monde. Repenser la philosophie comme une pratique ouverte de la conversation, de l’interprétation et de la redescription : tel est l’enjeu principal d’une interrogation sur les présupposés de la pensée « spéculaire ».
Richard Rorty (1931-2007) est l’une des figures centrales de la philosophie américaine contemporaine. Enseignant à l’université de Princeton, de Virginie et de Stanford, il fut à l’origine du renouveau du pragmatisme durant la seconde moitié du xxe siècle et contribua fortement à la remise en cause des principaux dogmes de la philosophie moderne et contemporaine.
Traduit de l’anglais par Thierry Marchaisse
Celle nouvelle édition de L’Homme spéculaire, préfacée par Olivier Tinland, restitue à l’ouvrage son titre original, Philosophy and the Mirror of Nature.