On lui disait toujours : « Ton visage expressif, c’est ça qui te rend jolie, tes yeux pleins d’étonnement, tes cheveux dans tous les sens, ta bouche qui parle tout le temps… »
Elle, honteuse, pensait secrètement : « Je ne pourrai donc jamais plonger dans la quiétude qu’on m’offre, dans la détente. Si je m’écoutais je creuserais un trou pour m’enfoncer en terre, mon corps me fait horreur : toute cette chair et ces formes, les veines les trous, les bosses. Dieu du ciel… N’être plus qu’une âme et puis c’est tout. Oui, une âme légère et volatile qui se promène seule en n’ayant besoin de rien, pas de cul pour s’asseoir. »
Et puis Ruben est arrivé. Les hésitations d’Estelle se sont muées en certitudes, ses fesses en deux petites collines, sa détresse en plénitude. Elle avait enfin trouvé sa place, sa raison d’être. Oui, Ruben était magistral. Mais lui de se demander, la trouille au ventre : vais-je, cette fois, tenir la distance ?
Bon Dieu, comment font les autres ?