J'ai eu envie, dix ans après la publication de mon premier roman, Beau Regard, de retrouver mes personnages qui venaient de participer à un singulier dîner de homard.
Ainsi, Ange, le narrateur, se retrouve-t-il - par le plus grand des hasards - chez les Tripp qu'il vient à peine de quitter. Et qui le convient aussitôt à passer la nuit sous leur toit.
De menus événements (un doigt coupé, une claudication, un saignement de nez), perçus comme autant d'indices révélateurs, alimentent cette étrange nuit vécue dans un état second, à mi-chemin du mauvais rêve propre aux digestions difficiles et aux fantasmes ou hallucinations éprouvantes que fait naître un sommeil impossible à trouver.
Se joue ainsi une partition narrative, cruelle et sauvage, où le cochon qui dort en chacun de nous prend peu à peu le dessus sur la digestion en cours des crustacés. Le séjour nocturne chez les Tripp s'assimile donc à un effrayant voyage intérieur où le refoulé s'allie à l'innommable. Une vraie nuit de cauchemar.
P.R.