Peintres, musiciens, poètes, photographes, chorégraphes multiplient les regards égoïstes ou généreux sur l’univers que décrit Marie-Claire Blais, le plus souvent impuissants face à sa destruction qu’ils fuient dans l’alcool ou la drogue, parfois l’amour ou plus souvent le sexe. Le monde lui-même explose, spatialement et temporellement, puisque ce récit très contemporain se projette souvent dans le passé ou dans d’autres continents (l’Afrique et la Chine, entre autres, mais aussi l’Iran ou l’Amérique du Sud, Uruguay, Colombie…). Cette vaste symphonie (qui a une cinquantaine de personnages traités presque à égalité et qui est écrite en très longues périodes) est aussi une réflexion sur les guerres, les racismes, les sexismes, la création artistique, les perversions familiales, les dérives, les désirs, les délinquances : tout s’entremêle dans un élan lyrique, très intense et enchevêtré, mais jamais confus. Il faut suivre la respiration intérieure du style et la vision globale que Marie-Claire Blais a de l’humanité et de l’histoire, à travers un filtre pessimiste, nocturne, mais aussi imprégné d’amour et de compassion, dans un paysage dominé par les tyrannies et les terreurs.
Marie-Claire Blais, canadienne, est née en 1939. Elle a obtenu le prix Médicis en 1966 pour Une saison dans la vie d’Emmanuel (Seuil, « Points »). Son œuvre romanesque, théâtrale, critique et poétique, couronnée de nombreux prix et publiée en France chez Gallimard, Laffont, Grasset, Belfond, compte une cinquantaine de titres parmi lesquels : La Belle Bête, Le loup, Une saison parisienne, Les Nuits de l’Underground, Pierre, Le sourd dans la ville, Visions d’Anna. Les éditions du Seuil ont publié Soifs et Dans la foudre et la lumière. Elle fait partie de l’Académie Royale de Belgique et de l’Académie des Lettres du Québec.