Né en Bucovine en 1936, Norman Manea a été déporté dans
un camp de concentration en Transnistrie, en 1941, comme
l'ensemble de la population juive de cette région. Ses
grands-parents y périront. À son retour, en 1945, il est fasciné
par l'utopie communiste, mais s'aperçoit très vite de
la réalité cruelle, perverse et tragi-comique de ce régime totalitaire.
Dès lors, la littérature se présente à lui comme un véritable refuge.
Poussé à l'exil en 1986, d'abord à Berlin-Ouest, puis à New York,
il se voit privé de son dernier asile et seul ancrage, sa langue.
À l'occasion d'un séjour en Roumanie en 1997, le temps se décloisonne
: la mère est morte entre-temps, mais les fantômes du passé
viennent croiser ceux du présent, entre réalité et hallucination.
Ce somptueux roman évoque soixante ans de ténèbres, ce qui
n'empêche pas un humour parfois burlesque. L'auteur explore un
«je» aux multiples facettes pour faire revivre un destin individuel
débarrassé des clichés de victimisation de la mémoire collective ;
il offre un fulgurant autoportrait entre terreur et beauté, qui dévoile
une époque chaotique et sanglante.