« Elle consultait anxieusement son smartphone au balcon quand le séchoir s’écroula à ses pieds. Un panier de pinces à linge se déversa dans la rue poisseuse. Elle gloussa. Il la trouva minable, repensa à l’action hors du commun qu’il avait réalisée la veille. Cette fille ne lui rendait pas justice.
– Déjalo, lâcha-t-il, en allant jeter sa roulée par la fenêtre, puis le séchoir, où pendaient deux petites culottes et une paire de chaussettes, à travers la pièce.
Il chaussa ses claquettes, enfila le débardeur mité, son armure pièce par pièce de ce qu’il en restait et s’en fut par l’habituelle défenestration. Ainsi commença sa journée. »
Le kendokei est tout à la fois un art martial et une philosophie créés par un Japonais chrétien du XVIIe siècle, mort à Dunkerque après avoir combattu avec l’Armada espagnole. Dans le Madrid contemporain, en dehors des vicissitudes quotidiennes (l’alcool, le crack, le chômage, son ex-femme Isabel et sa maîtresse Milagros), Donald Leblond enseigne la pratique du kendokei à son deshi (disciple). La nuit venue, revêtu de son armure de coléoptère géant, il devient El Escarabajo (Le Scarabée) et survole les toits de la ville pour défendre le Bien contre le Mal.