À l’heure où Marine Le Pen s’impose sur la scène politico-médiatique et engrange des scores électoraux sans précédent, il est urgent de décrypter la logique de son discours et d’expliquer son efficacité rhétorique. Que dit-elle qui parle tant à tant d’électeurs ? Avec quels mots, quels mythes, quelles images parvient-elle à faire mouche là où la parole politique semble partout ailleurs discréditée ? Et dit-elle autre chose que son père ?
Pour la première fois, une analyse littéraire et statistique de près de cinq cents textes permet de mesurer très précisément l’originalité de cette nouvelle parole frontiste. Discours, éditoriaux, entretiens radio et télévisés des deux présidents successifs du Front national sont passés au crible d’un double traitement informatique et rhétorique afin de cerner au plus près continuités et différences.
Dans sa stratégie de « dédiabolisation », Marine Le Pen a entrepris de réécrire le code frontiste : elle en a modernisé le vocabulaire, les thèmes et l’image. Mais derrière le changement de style, le sens de l’offre politique du Front national a-t-il changé ? Il n’est pas certain qu’il suffise d’adopter les mots de la République pour en porter véritablement les valeurs.
Professeure de littérature française à Stanford University, Cécile Alduy est l’auteur de Politique des "Amours" (Droz, 2007) sur l’émergence de l’identité nationale à la Renaissance.
Professeur-associé à l’Université Paris-Est-Créteil en communication politique et publique, Stéphane Wahnich a coécrit Le Pen, les mots (La Découverte, 1997).