Le parcours d’Anne Lauvergeon ressemble d’abord à une marche triomphale sous les ors de la République. Elle devient à 31 ans la secrétaire générale adjointe de l’Élysée, mais surtout le sherpa de François Mitterrand. En 1999, nommée par Lionel Jospin, elle prend la tête de la Cogema, qu’elle transforme bientôt en Areva, un énorme groupe aux capitaux très majoritairement publics. Ainsi, elle préside aux destinées de la filière nucléaire française. Un État dans l’État. Elle y régnera dix ans.
Mais c’est déjà la fin d’une success story. À l’occasion de son deuxième mandat, ses décisions à la direction d’Areva sont de plus en plus contestées : la fin du chantier de l’EPR finlandais est sans cesse retardée ; l’achat d’Uramin tourne à la débâcle financière ; le contrat jamais signé à Abou Dhabi pénalise toute l’industrie du pays… Des milliards d’euros que les contribuables voient partir en fumée.
Jadis louée et célébrée comme une star, et désormais attaquée de toutes parts, « Atomic Anne » doit maintenant répondre à ses nombreux détracteurs. Et elle y met toute sa fougue. Sans toujours convaincre. La présente enquête, minutieuse et documentée, permet de comprendre les enjeux attachés à son nom et d’apprécier les positions de chacun. En fil rouge, le rapport ambigu que l’ancienne patronne d’Areva entretient depuis toujours avec le pouvoir.
Jean-Louis Pérez, journaliste d’investigation politique, a réalisé pendant une dizaine d’années de nombreux reportages et enquêtes pour l’agence CAPA, et notamment l’équipe du « Vrai journal » de Canal+. Indépendant depuis 2010, il est l’auteur de documentaires tels que Un mort à l’Élysée, François de Grossouvre (2012) ou Madoff, l’homme qui valait 65 milliards (2014).