1931, à l'aube du nazisme. Un paquebot allemand quitte Veracruz à destination de l'Europe. Durant les vingt-sept jours de la traversée, la proximité de la vie à bord mêle tous les passagers. Peu à peu sur la foule colorée d'étudiants cubains, de danseurs espagnols, de commerçants, de professeurs allemands que les événements politiques obligent à gagner l'Allemagne, se détachent les personnages principaux, l'officier, le libéral, le révolutionnaire, le fasciste, le Juif, l'artiste. Chacun est prisonnier, comme il l'est sur le navire, des haines de race, de classe, de religion. Car cette traversée, bien évidemment symbolique, c'est celle qui amène le navire aux rives de notre temps. Quelle fatalité, s'interroge Katherine Anne Porter, a pu conduire l'humanité occidentale aux camps de la mort lente, aux excès de l'intolérance et de la bestialité? Ce que proposait La Montagne magique de Thomas Mann aux lecteurs de 1930, La Nef des fous nous l'offre aujourd'hui : l'image désormais classique d'une époque qui porte en elle son jugement.
Katherine Anne Porter est née en 1890, dans le sud des États-Unis. Elle a, très jeune, vécu et voyagé au Mexique et en Europe. Surtout connue par trois recueils de nouvelles: L'arbre de Judée (1930), Le vin de midi (1939), La Tour penchée (1944), cette autrice économe a attendu 1962 pour publier le livre auquel elle travaillait depuis 30 ans : La Nef des fous. Ce roman a aussitôt obtenu un immense succès dans tous les pays du monde, et s'est inscrit, pour de nombreux mois, sur la liste des best-sellers aux États-Unis.