Ce récit venu de nulle part (un hôtel aux sources chaudes, sur une île, dans l’Arctique) laisse libre cours aux fantasmes les plus étranges, parsemés d’images baroques, féroces, sanglantes. Il y règne un contraste plutôt surprenant entre la puérilité des personnages, leurs relations quasi clownesques et la violence presque insoutenable de certaines scènes traumatiques, qui constituent le leitmotiv de l’histoire.
Roman envoûtant, L’Île sans enfants oscille constamment entre deux registres, le grotesque, voire un burlesque fellinien, et un tragique teinté de fascination morbide. Le style de Minako Oba s’y déploie, dense, parfois virtuose dans l’intrication des métaphores ; la structure de l’œuvre est extrêmement sophistiquée dans la mesure où les personnages s’approprient tour à tour, et souvent sans transition, le fil d’un récit qui entremêle la passé au présent. Érotique, fantastique, cette fable improbable peut être lue comme un appel désespéré à une nouvelle éthique.