Aujourd'hui, la question de la « pauvreté urbaine » semble ne plus pouvoir se décrire autrement que dans le langage du « ghetto », des « favelas », des « banlieues » ou autres « quartiers sensibles ». Ce sont en effet sur certaines portions de la ville que se sont focalisés les débats publics, en Amérique comme en Europe, pour appréhender les inégalités. Cette focalisation pose cependant certains problèmes. Comment appréhender spatialement la question de la pauvreté sans occulter les mécanismes structurels à l'origine de ces inégalités ? Comment ne pas s'en tenir à une description misérabiliste de territoires qui seraient rongés par l'anomie, ou à une valorisation populiste de quartiers aux pratiques culturelles spécifiques ? Comment, parallèlement, analyser le traitement institutionnel de ces territoires et les transformations qui en découlent, en prenant en compte la manière dont elles sont vécues et reçues ? Pour éclairer les ambiguïtés qui marquent la gestion de la « pauvreté urbaine »au cours des dernières décennies, ce numéro analyse les préoccupations politico-morales, les impératifs managériaux et les dispositifs sécuritaires mis en place pour « lutter contre les ghettos » et créer de la « mixité sociale ».