Le nu impossible
Tout désigne le Nu comme un phénomène qui a si bien collé à la culture européenne que nous n’en sommes jamais sortis. L’Église a pu rhabiller le sexe, mais elle a gardé le nu.
En revanche, s’il est un espace culturel où le nu est resté complètement ignoré, c’est bien en Chine. Donnée d’autant plus surprenante que la tradition artistique chinoise a largement développé la peinture et la sculpture des personnages.
Une absence aussi radicale renvoie à une impossibilité. Nous voilà donc conduits à nous interroger sur la condition de possibilité du nu : à quoi, d’un point de vue théorique, a-t-il dû de s’interposer entre la chair et la nudité, le désir et la honte ? Rouvrant un accès sensible à l’ontologie, François Jullien en fait le révélateur de notre quête de l’en-soi et de la présence, en même temps qu’il met au jour un nouvel objet, d’'autant plus intéressant à penser qu’il est identifié par son absence : le « Nu impossible ».
François Jullien
Il est titulaire de la chaire sur l’altérité au Collège d’études mondiales de la fondation Maison des sciences de l’homme. Son œuvre est traduite dans quelque vingt-cinq pays.