Le récit de voyage est l'un des plus anciens
genres littéraires : Hérodote, Jean de Léry, Nerval,
Gautier, Stendhal se sont essayés à cette littérature
du «nomadisme». Si le XIXe siècle est marqué
par une volonté de redéfinir le genre, le
XXe siècle, pour sa part, remet plus radicalement
en cause la possibilité même de voyager, de
découvrir du jamais vu, de rencontrer de l'inattendu.
À cette thèse de la «fin des voyages»
s'ajoute l'idée d'une impossible neutralité : tout
récit porte en lui la particularité culturelle et
politique de celui qui témoigne. Cependant, les
écrivains voyageurs qui ont dominé la modernité
- Gide, Michaux, Leiris, Lévi-Strauss, Bouvier,
Segalen - ont choisi de se défaire de tout classement
ou étiquette : le voyage est pour eux
l'occasion de s'enraciner en une réalité autre,
sans verser dans l'idéalisation du «différent»
ou dans l'ethnocentrisme condescendant.