Pour un nouveau mot qui entre dans le dictionnaire (comme le verbe « kiffer »), c’est douze verbes qui sont condamnés à ne plus être dits par les adolescents. Car la langue est un code, avec ses lois, sa grammaire, et qui les ignore ou les malmène menace son lien avec autrui. Le barbarisme mène à la barbarie, tel est le credo de Cécile Ladjali, son cri d’alarme. Car, encouragés par la mode banlieue et les nouveaux supports qui exigent vitesse et laconisme (SMS, MSN, emails), la plupart des jeunes parlent désormais une « mauvaise langue », doublée d’une orthographe désastreuse, et s’en vanteraient presque puisque l’autre langue est devenue celle des « bouffons ». Ni réactionnaire ni démagogique, Cécile Ladjali fait donc plutôt l’éloge d’un nouveau bilinguisme. Apprendre le français dans ce qu’il a de convenu et d’académique au bon sens du terme, le maîtriser pour ensuite s’en écarter, telle est l’unique façon de ne pas être dupe des rébellions qui fissurent ce qui fait le ciment d’une société civilisée, à savoir sa langue.
Agrégée de lettres modernes, Cécile Ladjali a trente-six ans. Elle est professeur dans un lycée de Seine Saint-Denis et à la Sorbone Nouvelle. Elle est aussi l’auteur de trois romans parus chez Actes Sud et d'un essai avec George Steiner.