Si la mathématique n’est ni du Ciel ni de la Terre, il importe de chercher le lieu où elle réside. Il devient alors nécessaire de s’installer au cœur des textes mathématiques eux-mêmes, pour mettre en lumière la nature du discours qui les constitue. Ce discours enchaîne des idéalités explicites ; mais, par-delà l’explicite, et le soutenant, vit un système de relations non exprimées dont la présence et les connexions entraînent et dirigent les gestes du mathématicien créateur. Apprendre à déchiffrer ces connexions, dégager la structure du domaine où elles s’engendrent, constitue alors une démarche préalable à une épistémologie valide des mathématiques. On s’efforce, à ce moment, d’écouter un autre discours que celui de la mathématique écrite, de tisser un autre espace que celui où s’enchaînent les opérations immédiatement perceptibles.
Jean-Toussaint Desanti (1914-2002) est, par son enseignement et son œuvre, l’un de ceux qui ont marqué la philosophie française actuelle.
Son œuvre maîtresse, Les Idéalités mathématiques, qui fait aujourd'hui autorité, a été publiée aux éditions du Seuil en 1968.