Zeta est sacrément excentrique. Sentimentale, généreuse,
bohème, aimant la rigolade et les mecs, elle n'a que deux
défauts : être un peu trop grosse et adorer à la folie Moisés, un
macho infâme, une bête féroce, un apparatchik déchu qui la
cogne et lui fait une vie impossible. C'est bien ce qui rend
furieuse Linda Roth, la meilleure amie de Zeta, une tête froide
et très cultivée, une «écrivaine» à succès, aimant elle aussi
la rigolade et... les filles, rien que les filles. L'une vit dans
la Maison du Joyeux Marteau où règnent le bruit et un
indescriptible désordre, l'autre dans un splendide duplex à la
bibliothèque bien fournie et impeccablement rangée.
Inséparables, elles doivent faire face, avec leur bande de
copains - et de copines - très déjantés, aux mille et une tracasseries
de la vie quotidienne. Car avoir vingt ans à La Havane à
l'époque révolue des idéologies et du glorieux avenir socialiste,
c'est survivre comme on peut : prostitution par-ci, trafic de
dollars et de moteurs de voiture par-là, troc, contrebande de
cigares, et beaucoup de sexe, de rhum, de fêtes et de musique.
La Havane est la ville aux mille métiers, la capitale du système D,
où l'on rebâtit quand même le monde, sans nostalgie du passé,
sans lamentations, avec une vitalité capable de triompher de la
sclérose politique et du machisme dominant.