L’obsession sécuritaire est en train d’accoucher d’une démocratie en liberté surveillée. Nous, citoyens du XXIe siècle, sommes désormais tous fichés, filmés et répertoriés. Et d’une manière bien plus implacable que nous ne le pensons d’ordinaire. Pour s’en rendre compte, il suffit de recenser les différentes techniques qui concourent aujourd’hui à cette mise en mémoire de nos faits et gestes les plus quotidiens. Du téléphone portable à la carte bancaire ou de fidélité, du dossier médical à la carte de transport, du suivi des connexions Internet à la multiplication des caméras de vidéosurveillance, il n’est quasiment plus un seul espace de notre vie quotidienne qui échappe à cette vigilance. La possibilité de « croiser » ces fichiers contribue à réduire encore les derniers périmètres privés dans lesquels pourait s’exercer notre liberté. Nos vies entières sont progressivement scrutées et mises en cartes. Dès lors, deux questions se posent : allons-nous accepter docilement, au nom de la sécurité, cette perversion redoutable du principe démocratique, et la Commission nationale de l'informatique et des libertés pourra-t-elle nous protéger ?
Claude-Marie Vadrot. Grand reporter de 1989 à 2006 au Journal du Dimanche, actuellement journaliste à Politis. Partage ses activités entre les reportages à l’étranger et les enquêtes sur le fonctionnement de la société française. Il a publié de nombreux articles sur le fichage des citoyens dans les démocraties modernes.