Les années 2010 marquent un tournant pour la France, frappée comme jamais auparavant par le terrorisme et résolue à mener un combat de long terme pour l’endiguer. En 2014, l’État se décide à lutter contre la radicalisation. Longtemps dénigrée, cette stratégie apparaît désormais si évidente que l’infléchissement dont elle procède suscite peu d’interrogations. Qu’est-ce que la prévention de la radicalisation ? La difficulté de la réponse tient à la nature incertaine de cette entreprise, qui renvoie à un faisceau complexe d’actions expérimentales, aux objets disparates et aux contours évolutifs. Il est pourtant urgent d’expliciter les logiques qui façonnent ce modèle sécuritaire car elles mettent au défi notre capacité à (re)faire société face à l’un des enjeux politiques majeurs de ce début de XXIe siècle.
Romain Sèze est sociologue, chercheur à l’Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ), rattaché au Groupe Sociétés, Religions et Laïcités (GSRL-CNRS). Ses recherches portent sur l’islam contemporain et sur les politiques de régulation du culte musulman en Europe.