L’Occident n’a pas su voir que du crime de Tiananmen surgissait la Chine d’aujourd’hui. En 1989, après la répression du mouvement démocratique, nombreux sont ceux qui prédisent la chute du régime communiste chinois. « Un pouvoir qui tire sur sa jeunesse n’a pas d’avenir », déclare le président François Mitterrand. Trente ans plus tard, le régime de Pékin lui donne tort.
De la tragédie est né un nouveau modèle : Tiananmen est le terreau – et le secret de famille – de la dictature qui se déploie sous nos yeux. Dans le sillage de juin 1989 triomphe un courant d’idées connu sous le nom de néo-autoritarisme chinois. D’abord conceptualisé à des fins de justification du massacre puis comme étape nécessaire avant la démocratisation, il n’a cessé de monter en puissance jusqu’à la version « dure » qui est celle d’aujourd’hui. « Il existe une solution chinoise », a déclaré Xi Jinping. Il est temps que les démocraties occidentales comprennent la logique à l’œuvre dans ce pays depuis trente ans pour éventuellement la contrer.
François Bougon est journaliste au Monde. Sinophone, il est l’auteur notamment de Dans la tête de Xi Jinping (Solin/Actes sud 2017).