Le roman traditionnel a longtemps puisé dans le réel vécu de ses auteurs, le racontant, le transposant, le dissimulant, le triturant, le torturant, le sublimant. Cela s’est fait, et continue à se faire de nos jours, d’innombrables manières.
La narratrice de La Mezzanine, Catarina Quia, a joué, elle, « franc jeu ». Elle n’a rien censuré ou déformé des circonstances terribles dont elle entreprenait, par la fiction, de se libérer. L’audace est grande, avant tout formelle : ne pas dissimuler le contexte proprement infernal de la composition.
[…] Comme dans le roman médiéval, les noms des personnages sont lourds de sens. Le nom du personnage principal, surtout s’il envahit le titre, pèse. Le lecteur le reçoit en pleine lecture et ses yeux s’y heurtent sur les pages. Il est impossible de ne pas s’émerveiller de son étrangeté, de sa singularité.
« Quia ». Qu’est-ce que ce nom ? Il est prélevé tel quel d’un mot latin ; dont le sens est « parce que ». Catarina Quia est l’auteur « parce que ».
Peut-être « parce qu’il en est ainsi ». Peut-être : « parce qu’elle s’explique ».
[…] La Mezzanine. Le dernier récit de Catarina Quia est une étrange, une surprenante, une paradoxale réussite.
Jacques Roubaud