« Franck devait appréhender ce moment où nous nous trouvions face à face sous les aspects d’une conversation détendue, il subissait un interrogatoire. Je me montrais curieux d’un tas de broutilles concernant les incertitudes de l’adolescence, mais j’étais davantage intéressé par l’intimité de sa mère. Ces séances ne faisaient qu’intensifier le mystère, car Franck éludait les questions qui l’incommodaient. Je n’assumais pas vraiment mon indiscrétion. Jamais je ne me serais résolu à demander de manière frontale à mon fils si mon ex-femme avait une vie amoureuse. »
Voilà un homme qui a une curieuse opinion de lui-même. Ce conducteur de car scolaire, éleveur de chiens à ses heures, porte en lui une sorte d’effroi face à l’existence. Il est de ceux dont on dit qu’ils sont « passés à côté de leur vie ». Peut-être est-ce pour cela qu’il s’applique à fuir. Tout comme son fils, qui lui répond tel son reflet inversé. Deux hommes à la fois identiques et opposés, les mots de l’un prolongeant ceux de l’autre.
Avec son classicisme apparent – mais peut-être vaudrait-il mieux parler de rhétorique, tant le langage y est surveillé –, Les Beaux Jours installe au cœur de ce récit un doute que rien ne saurait apaiser.