Quelle place pour le peuple dans la démocratie ? L'ouvrage de Jacques Julliard gravite autour de cette interrogation fondamentale. " En donnant à ce livre le titre L'Esprit du peuple, j'ai voulu signifier qu'il s'inscrit tout entier en faux contre la tendance commune à l'intelligentsia de gauche, aux apparatchiks du socialisme, comme, bien entendu, aux théoriciens du capitalisme, qui est de faire du peuple une masse de manoeuvre inerte, entièrement déterminée par sa place dans la production. Le peuple a sa propre intelligence de l'Histoire et sa propre conscience morale. "
Ce volume, qui réunit des textes d'origines diverses, forme un ensemble aussi passionnant qu'éclairant pour comprendre l'itinéraire personnel, politique et moral de l'un des grands intellectuels de notre temps, historien reconnu du mouvement ouvrier et des gauches françaises.
Jacques Julliard évoque ses origines, retrace son parcours étudiant en khâgne à Lyon, puis à l'École normale supérieure, son entrée à la revue Esprit et son expérience de la guerre d'Algérie. Les questions sociales occupent une place centrale dans son oeuvre, sa réflexion et ses engagements militants. L'autonomie ouvrière, le syndicalisme d'action directe autour de Fernand Pelloutier, Mai 68 et le syndicalisme révolutionnaire, l'idée d'autogestion, le populisme du peuple et l'élitisme des élites – autant de thèmes ici recensés par celui qui fut l'un des compagnons de route de la CFDT et de la gauche rocardienne. Jacques Julliard revient ensuite sur des lieux d'action et de mémoire plus politiques, sur son rôle au Nouvel Observateur et aux éditions du Seuil, et sur la figure de ceux qu'il appelle " les miens " – ses maîtres et ses inspirateurs : Pascal, Péguy, Proudhon, Bernanos, Simone Weil. Dans une conclusion passionnante, inspirée par la déroute de la gauche, Jacques Julliard dresse un état des lieux qui résonne comme un appel à sa refondation intellectuelle. Son ouvrage fournit des références utiles pour l'avenir.