Longtemps, jusqu'à la fin des années soixante-dix, il fut entendu en France que le développement des pays de l'Afrique " francophone " allait bon train. Et soudain, depuis la deuxième moitié des années quatre-vingt, on annonce partout le désastre : ces pays sont sinistrés, économiquement, financièrement, socialement, politiquement. On appelle cela " l'afro-pessimisme ". La faute aux Africains ? Voire. Pour mieux comprendre, l'auteur a choisi de revenir dans son village natal, au Sud du Cameroun, après plus de trente ans d'exil. Et il fait dans ce livre le récit de ce retour, d'une plume acérée. Un récit concret, passionnant, qui part de la vie quotidienne des femmes et des enfants dans la brousse, se poursuit dans les grandes villes rongées par le chômage et la misère, et se termine par une mise en cause radicale de la corruption des élites tenues à bout de bras par l'État français. Car si l'Afrique francophone implose aujourd'hui, souvent dans le sang et la violence, c'est bien la " coopération française " qui en est principalement responsable : pour maintenir son rêve de grande puissance, la France a soutenu dictateurs et partis uniques et bloqué toute perspective d'une prise en charge autonome de leur propre développement par les populations africaines. Ce sombre constat, pour Mongo Beti, permet pourtant l'espoir : la profonde remise en cause du système français de domination qui se fait aujourd'hui, du Cameroun au Togo, du Congo à la Côte-d'Ivoire, est en effet la condition nécessaire - certes non suffisante - d'une mobilisation des forces vives de l'Afrique francophone.