L'assassinat littéraire est une tradition très française qui vient de loin, quand bien même l'époque chérirait la modération ou la nuance hypocrite." L'ai-je bien descendu ? ", cette question-là, combien sont-ils, écrivains et journalistes, à se l'être posée après avoir levé la plume ? Descendre un adversaire, un concurrent, c'est assez ordinaire sauf quand tout à coup la grâce – certains diraient le style – élève cet exercice
au rang des beaux-arts.
Ce qui importe dans cet exercice n'est pas la violence mais la précision du trait, sa capacité à faire du portrait autre chose qu'une simple photographie prise sous un angle malveillant.
De Saint-Simon à Françoise Giroud, en passant par Hugo et Mauriac, on a là une diversité de talents et d'ambitions, que réunissent autour d'une même cause un amour du bon mot, une capacité d'indignation moqueuse ou assassine.
Il faut avoir rassemblé ces textes pour mesurer combien reste puissante cette tradition dont on aimerait, loin des extrémistes aux idées courtes, loin aussi des adeptes mollassons d'une prétendue bienveillance, qu'elle ne reste pas sans héritiers.