Après les onze livres consacrés aux travaux des champs qui dépendent de l'intendant, le douzième offre un témoignage presque unique sur la condition de la femme servile à un poste élevé dans un grand domaine au début du Ier s. Choisie pour son absence de défauts comme l'ivrognerie, la paresse et le libertinage, pour son physique convenable et son discernement, donnée comme compagne à l'intendant, l'intendante a une grande responsabilité dans l'organisation et la surveillance du travail à la ferme: distribution des tâches journalières aux esclaves, soins aux malades, direction du travail de la laine, de la confection des vêtements et des approvisionnements. Elle veille aussi aux préparatifs des travaux extérieurs de la vendange et de l'olivaison. On devine que cette esclave, en l'absence du maître qui réside à la ville, a un certain pouvoir de décision et que presque tout, hormis les cultures et l'élevage, repose sur sa vigilance. L'obligation qu'elle a de procéder aux conserves pour le ravitaillement hivernal présente un aperçu des usages alimentaires. Par le biais d'un tableau des tâches de l'intendante, Columelle a laissé un document incomparable sur l'activité domestique intérieure du domaine.
Jacques André, Directeur d'Études à l'École pratique des Hautes Études et ancien directeur de la collection latine des Universités de France aux Belles Lettres, est l'éditeur de nombreux textes d'auteurs latins dont Pline l'Ancien, Ovide, Apicius, Tibulle et Isidore de Séville. Il s'est en outre intéressé à l'histoire des mots latins, en particulier en botanique. Il a publié dernièrement aux Belles Lettres, Être médecin à Rome dans la collection Realia.