C'est à Antioche, ville-phare de l'Orient christianisé, qu’en février 363 un homme laisse exploser sa colère dans un discours, le Misopogon (l’" Ennemi de la barbe "), qui a traversé les siècles sans perdre de sa force. Quand tant d’autres ont disparu, ce document fut conservé par la grâce des dieux, peut-être, mais surtout du fait de l’étonnante personnalité de son auteur qui ne laissait personne indifférent, pas même ses pires détracteurs.
L’homme n’est rien moins que l’empereur Julien, dit l’Apostat. Son discours, magnifiquement authentique car si peu conventionnel, éclaire le rendez-vous manqué entre les valeurs qui l’animaient, novatrices autant que réactionnaires, et la réalité complexe d’une civilisation en marche malgré lui. Il souligne aussi la tension entre son idéal philosophique, teinté de mysticisme ambitieux, et la mission du chef d’État qui aurait dû continuer d’œuvrer à l’unité impériale dans le respect des différences et dans une relative acceptation des médiocrités humaines.
Discours d’adieu : Julien tourne le dos à Antioche pour suivre les traces d’Alexandre le Grand et mourir, quelques mois plus tard, sous les traits des Perses.