L'amour à l'ombre du sida.
" Quand tu entres en prison, tu fais un examen de santé. Le médecin m'a fait appeler pendant la promenade et m'a dit : "Il vous reste entre cinq et dix ans à vivre. Il n'existe pas de traitement." Rien de plus. C'est comme ça que j'ai appris que j'étais séropositif. J'avais 18 ans, c'était en 1989. Je venais de perdre un frère. Mon second frère est mort du sida à ma sortie de prison, puis ma sœur. J'ai une autre sœur séropositive. Elle vit avec un séronégatif et ils ont deux enfants. À Massy, c'est toute une communauté qui a été décimée. À une époque, quand je croisais d'anciens compagnons de drogue, ils me lançaient : "T'es toujours en vie, toi ? On m'avait dit que t'étais mort." "
K.
" J'ai rencontré Kimo et sa compagne, Laurène, au cours d'un reportage que je réalisais sur le vécu des couples "sérodifférents", où l'un est séropositif et l'autre séronégatif. Durant trois heures, ils m'ont parlé d'eux, de leur vie avec la maladie, de leur désir d'enfant. Kimo a aussi évoqué rapidement son enfance, son père d'origine portugaise, qui buvait et le battait, la grande sœur qui s'est occupée de lui, la "came", dans laquelle il est tombé à l'âge de 15 ans, comme le reste de sa fratrie, la prison, le foyer, son histoire d'amour avec Laurène, la désintoxication, les résistances aux trithérapies, les hospitalisations... À travers le récit singulier de cet homme, c'est aussi l'histoire de l'arrivée conjointe du sida et de l'héroïne dans certaines cités de banlieue qui se dessine, une histoire encore taboue dans ces cités elles-mêmes. "
L. D.