L'Anthologie de la poésie symboliste et décadente comble une lacune dans l'édition française en offrant un choix quasi exhaustif de cette période qui compte parmi les plus riches et les plus influentes de la poésie française. Pour la plupart des poètes en question, il est en effet difficile, sinon impossible, de se procurer actuellement le moindre recueil, et on est loin de les trouver tous dans des anthologies.
Des grands poètes aux moins connus, de Banville (1823-1891) à Mallarmé (1842-1898) et à Jarry (1873-1907), c'est soixante et onze écrivains (plus un choix des poètes du Chat noir) qui sont ici présentés, montrant toutes les tendances de la poésie du temps, et faisant de cette anthologie la plus complète à ce jour sur le sujet. Elle contribue à remettre à sa juste place cette école d'où est sorti tout le modernisme anglo-saxon.
Dès 1913, Ezra Pound (1885-1972) reconnaissait dans New Age la principale revue de ce mouvement « L'histoire de la gloire poétique anglaise est l'histoire de vols réussis à la poésie française » – entendu au symbolisme et au décadentisme. Quant à T.S.Eliot (1888-1965), c'est à Gourmont (1858-1915) qu'il a reconnu sa dette dans The Sacred Wood, et l'on pourrait citer quantité d'autres exemples qui font que la notoriété de Jules Laforgue (1860-1887), de Marcel Schwob (1867-1905), de Maurice Maeterlinck (1862-1949), est bien plus grande aux États-Unis et en Angleterre que dans leurs pays natals. Leurs pays en effet, car, s'ils sont unis par la langue française, les symbolistes le sont aussi par un cosmopolitisme remarquable, puisqu'ils étaient belges, polonais, suisses, grecs, américains d'origine aussi bien que français.