« Les Grecs, toujours si jaloux de leur indépendance, ont toujours été fiers de proclamer leur obéissance aux lois. De fait, ils ne cherchaient pas à définir leurs droits et leurs libertés par rapport à la cité dont ils faisaient partie et à laquelle ils s'identifiaient: ils demandaient seulement que cette cité elle-même fût régie par une règle à elle et non point par un homme. La loi était ainsi le support et le garant de toute leur vie politique. (...)
Mais cette loi, dont ils étaient si fiers, n'assumait ce rôle à leurs yeux que parce qu'elle était leur Œuvre et tirait son pouvoir d'un consentement initial. Autrement dit, elle n'avait point de garant dont elle pût se réclamer: la loi grecque n'était pas, comme la loi juive par exemple, une loi révélée. Elle était née des conventions humaines et des coutumes. (...) Cette double circonstance devait susciter autour de la loi des réflexions des débats, des attaques et des justifications: ainsi s'explique pour une bonne part, le nombre et l'importance des textes grecs relatifs à la loi. En outre, la réflexion fut stimulée par le fait qu'à Athènes, au Y" siècle, avec l'épanouissement de la pensée critique et l'influence des sophistes, toutes les valeurs et toutes les notions furent analysées, définies, contestées, dans un élan intellectuel sans pareil. (...) L'idée de loi ne fait pas exception et la crise qu'elle connut aida très largement à en préciser les contours.
Cette crise, qui est capitale pour l'histoire de la cité grecque comme pour celle des doctrines politiques en général, constitue le sujet du présent ouvrage. »
].d.R.