À l'approche des 110 ans du Goncourt, ce livre propose la première enquête d'envergure sur un dispositif très mal connu mais miroir grossissant de la condition littéraire contemporaine. Reposant sur de très nombreux entretiens , il ne se limite pas aux grands prix d'automne, mais interroge aussi les innombrables (entre 1 500 et 2 000, rien qu'en France) prix populaires ou encore ceux des " mauvais genres " (BD, policier, littératures de l'imaginaire).
Les prix littéraires sont une " exception française " mal connue : s'ils prolifèrent en France, ils se diversifient selon des logiques très diverses liées à une " économie du prestige " complexe. Cette enquête, menée à partir de nombreux entretiens auprès d'écrivains et de professionnels du livre, cherche à éclairer cette complexité afin de saisir les nouvelles configurations de la condition littéraire contemporaine.
Avec les prix, ce sont des reconfigurations majeures du monde littéraire qui se donnent à lire : déclin de la fonction sociale et de l'autorité symbolique de l'écrivain ; déclin du livre comme objet sacralisé ; déclin de la lecture et mutations des pratiques culturelles ; métamorphoses de l'expertise littéraire ; figurations nouvelles du littéraire.
De l'homme de lettres d'hier à l'écrivain minuscule d'aujourd'hui, ce sont bien les effets à la fois structurants et paradoxaux des prix littéraires que ce livre cherche à pointer. Structurants : les prix régulent un marché et une offre, contrôlent et font perdurer une certaine idée de la littérature en l'ouvrant au plus grand nombre, proposent une définition normée de la lecture et du goût. Paradoxaux : les prix inscrivent l'écrivain dans une communauté, mais le fragilisent dans sa singularité ; ils obéissent à un protocole réglé dont l'écrivain ne décide pas des règles ; ils mettent en lumière mais n'aident pas à durer.
Cet ouvrage se veut une contribution à l'histoire culturelle du statut de l'auteur qui interroge l'effondrement de son rôle social dans la sphère publique.