De quoi le peuple juif est-il le martyr, le témoin ? Qu'est-ce qui fonde la parenté entre le judaïsme et l'avant-garde autour de ce témoignage, pour que le totalitarisme nazi les unisse dans sa haine ?
La tradition juive, l'avant-garde et le totalitarisme s’éclairent réciproquement. L’objectif de l’artiste est de parvenir à une construction de la personnalité. La personne est le point archimédien de la transformation du monde et, dans sa relation à l’absolu, elle est le lieu de l’évaluation. C’est de cette priorité qu’il s’agit, bien plus que d’une préoccupation de rénovation des formes. L’interprétation qui en découle concerne aussi bien l’œuvre de Kandinsky que celle de Malévitch ou de Schwitters, le film dada, le cinéma d’Eisenstein, ou encore le travail de Man Ray. Cette nouvelle interprétation parvient à éclairer une des œuvres les plus énigmatiques du siècle passé, celle de Duchamp.
Le totalitarisme n’est pas seulement un phénomène historique, c’est une tentation de la conscience contemporaine, de son art, de sa communication collective et de son système architectural. La falsification totalitaire se lit aussi bien dans l’invention d’une fausse transcendance que dans l’indifférence évaluative qui, de nos jours, délègue à l’abstraction monétaire ou au consensus le soin de déterminer les valeurs de l’art.
Ce livre appelle à une nouvelle évaluation de notre culture et s’attache à en fournir les instruments.
Philippe Sers, philosophe, éditeur et essayiste, s'est spécialisé dans l'avant-garde et l'interprétation de l'œuvre d'art comme mode de vérification. Dans cet ouvrage il effectue une démonstration audacieuse et convaincante de la méthode qu'il propose.