Jacques Réda, dernière grande plume de sa génération est un fervent partisan des correspondances manuscrites et des envois postaux. Affranchissons-nous avait déjà relevé, dans la rêverie, le plaisir de ces pratiques. L’envoi d’une lettre tenait alors de l’anodin : pressentait-il déjà les changements que le numérique portait en son germe ? Ici il vole au secours de ce patrimoine fait de petits bureaux de province, de timbres trafiqués et de négociations à foison. Son verbe, vengeur et nostalgique, gifle la modernisation du système postal et prône le délice du chaos face à ses rouages cadencés. Un éloge qui ne se cantonne pas aux boîtes aux lettres et qui tente, d’un gai pessimisme, de ramener la société et son monde à la raison, vers l’essentiel et les joies sincères, ce monde «pris de démence et où tout nous incite à demeurer doucement mais fermement timbrés».