« Nous étions trois dans la baraque : mon grand frère, ma grande soeur et moi, “el bint”, l’enfant, la fille, éternelle troisième personne du singulier. »
Une famille, une maison au milieu du désert israélien. La mère : une femme d’origine égyptienne qui parle un mélange d’arabe et de français et veut tenir sa « baraque » coûte que coûte. « L’enfant », qui n’a pas de prénom. Elle est cet être qui erre dans la baraque, dont la mère n’a peut-être jamais désiré l’existence. La Nonna – la grand-mère – l’aime et la couve comme sa propre fille. Presque trop. Surtout quand la mère part à l’aube pour aller faire le ménage dans de grandes maisons bourgeoises et ne revient que tard le soir. Il y a la soeur, Corinne, grande coquette qui se marie trop tôt et passe son temps perchée sur des talons aiguilles à ébaucher des projets farfelus. Le frère, Sammy, menuisier, qui déteste les beaux vêtements et aime boire des litres de coca. Et le père, Maurice, l’éternel absent, le révolutionnaire idéaliste, qui va et vient dans la famille comme une ombre.
Et « l’enfant » qui voit tout, se souvient et reconstruit pour nous le puzzle familial. Ronit Matalon nous offre avec Le bruit de nos pas un texte d’une sensibilité et d’une poésie inouïes sur une famille immigrée, démantelée. En décortiquant la structure familiale et la place centrale qu’y occupe la mère, elle interroge la fragilité du vivre ensemble, malgré l’amour et les liens du sang.