D'une horloge, nous exigeons qu'elle se répète avec exactitude. De la vie, même dans la monotonie de la tâche quotidienne, nous attendons qu'elle invente, qu'elle nous étonne. Le ressort de la vie, c'est la surprise.
Ce volume est le dernier des Mémoires du Père Bruckberger. Il couvre la partie la plus combative, la plus controversée, la plus féconde de sa vie, de 1958 à 1987, où il a eu des champs d'activité divers : cinéma, littérature, journalisme ; où il a fréquenté les avenues du pouvoir : portraits de De Gaulle, de Pompidou, de Malraux, éclairés d'une lumière shakespearienne. Le récit, sur le rivage d'une île grecque, des retrouvailles avec Camus et Michel Gallimard, a les couleurs de la fable.
Le ton de ce livre est la sincérité. Le Père Bruck ne ménage ni son lecteur, ni lui-même. Il marche à l'aveu comme on marche au canon. Ce n'est pas tant avec les autres qu'il règle ses comptes, qu'avec lui-même. Cela donne un récit poignant, où il tente d'introduire quelque cohérence dans ses contradictions personnelles, sans y parvenir d'ailleurs : « Je refuse d'être déculpabilisé, j'ai besoin d'être pardonné! » À l'angoisse se mêle l'espérance. Une dimension donne à ce récit sa perspective propre, la foi en Jésus-Christ, qui accompagne en contrepoint tout le livre, tel, dans le lointain, un chant.