Si Walter Benjamin en 1935 l'évoque comme homme allemand, c'est pour avoir su « sans gloire préserver l'honneur, sans éclat la grandeur, sans appointement la dignité ». Malgré son effacement, Seume céda à ses amis et se plia à contrecœur à la tâche de décrire sa vie, se jugeant seul dépositaire de son originalité.
Lecteur passionné des ouvrages des Anciens, il fait de la sérénité une conquête permanente mais possible. L'époque n'est pas au lyrisme: observateur du monde, il y décèle les avatars de l'esclavagisme et de l'injustice. Puisant dans ses seules ressources morales, il s'efforce de surmonter les bouleversements personnels et ceux d'n pays où s'installe la domination napoléonienne.
Le travail d'écriture accompagne dans l'ombre le refus d'un ordre établi inégalitaire. De l'autobiographie, écriture intime livrée au public, et ici dans sa première phase historique, s'extrait une individualité sans compromission. Prônant l'émancipation des tutelles dans la droite ligne des penseurs du XVIII
e siècle, cet esprit toujours en éveil est porté par une sensibilité aux choses les plus communes.
Avec une ultime lettre à Wieland, dictée par une fidèle amitié, et un tout dernier récit de voyage, ces fragments d'une remémoration manifestent une foi en la seule humanité.