Un retour à la Grèce, ainsi se définit Cligès, le deuxième roman de Chrétien de Troyes, daté de 1176 : l’inventeur du roman breton se laisse hanter par les souvenirs de Troie et de Thèbes, de Tantale et d’Alexandre, de Médée et des magiciennes de Thessalie, avant d’explorer plus avant la forêt de Brocéliande sur les traces de la Fée amante.
Aux « métamorphoses » d’Ovide, il oppose la sienne, la « muance » de l’oiseau d’Héliopolis dont Phénice, son héroïne, porte à merveille le nom. L’amour ne se décline plus sur le mode d’une passion fatale, qui s’abîme dans la mort, il est œuvre de vie et naissance nouvelle.
Cligès opère la transmutation de Tristan et Iseut.
Sans rien ignorer cependant de I’œuvre des ténèbres, des tours de l’illusion ni des voies de la dérision : l’histoire de la fausse morte rappelle la Femme de Salomon et annonce Roméo et Juliette.