Le philosophe néoplatonicien Simplicius a vécu au VIe siècle de notre ère. Originaire de Cilicie en Asie Mineure, il se rendit en Perse accompagné de six autres philosophes, probablement à la suite d'un décret de Justinien leur interdisant d'enseigner et de percevoir un salaire public. Il rentra dans son pays suite au traité de paix conclu en 532 entre le roi Perse Chosroès et Justinien, et s'installa à Harrân, ville de l'Empire Byzantin proche de la frontière perse. C'est là qu'il composa les cinq commentaires qui nous sont parvenus sous son nom. Parmi ces commentaires, celui traitant du Manuel d'Épictète est le seul qui ne soit pas consacré à un traité aristotélicien.
Comment expliquer le fait que Simplicius, philosophe platonicien, ait commenté les maximes éthiques d'un stoïcien ? Les néoplatoniciens, depuis Porphyres, avaient défini un canon de quatre degrés de vertus : les vertus civiles ou politiques, les vertus cathartiques, les vertus théorétiques et les vertus paradigmatiques. Lorsqu'on parvenait au degré le plus élevé des vertus, la séparation de l'âme et du corps était totalement accomplie. Néanmoins, avant de parvenir à cet état d'apathéia, une instruction éthique préparatoire était nécessaire pour atteindre le premier degré des vertus. Ainsi, pour Simplicius, le Manuel d'Épictète représentait une propédeutique à la pratique morale visant au premier degré des vertus, les vertus civiles ou politiques. Par la lecture des sentences du philosophe stoïcien, le disciple pouvait parvenir à la domination des passions par la raison avant de s'élever vers la contemplation de l'Intellect, qui représente pour les platoniciens le niveau d'être le plus élevé.
Le premier volume du Commentaire sur le Manuel d'Épictète dans la Collection des Universités de France comprend le texte de Simplicius accompagné de la traduction d'Ilsetraut Hadot. Le traité est précédé d'une introduction dans laquelle sont présentés la vie et l'œuvre du philosophe, les enjeux philosophiques du Commentaire, ainsi que l'histoire du texte.