Le système productif contemporain repose sur le paradoxe de la destruction créatrice, faisant de la richesse une affaire non pas d'accumulation et de patrimonialisation, de construction et d’édification, mais de destruction, d’obsolescence programmée, de place nette et de table rase. Cette illusion quasi métaphysique, produite par les grandes guerres du XXe siècle, est aujourd’hui de moins en moins soutenable, de plus en plus coûteuse d’un point de vue aussi bien symbolique que matériel.
La critique du système productif change dès lors de nature. Il s’agit moins de penser l’intensification de la production, sa libération, sa généralisation à l’ensemble des activités sociales que sa durabilité, voire sa « générativité », à savoir sa capacité à transmettre ses fruits à la postérité. Ce qu’on appelle le développement durable. C’est à la recherche de ses principes aussi bien philosophiques que techniques et juridiques que s’attache la Critique de la destruction créatrice.
Pierre Caye, ancien élève de l’École Normale supérieure, directeur de recherche au CNRS, a consacré une part importante de ses recherches à la question de la technique à l’âge humaniste et classique. Il est aussi l’auteur d’un essai de philosophie morale : Morale et chaos. Principes d’un agir sans fondement (2008).