On s'est servi de Herder (1744-1803) pour revendiquer le particularisme contre l'universel, le sentiment contre la raison, le romantisme contre le classicisme, le national et l'originel contre l'étranger. Par conséquent, on ne pouvait trouver en lui, bon gré mal gré, que des contradictions et des discriminations. Or loin d'opposer les langues, les peuples, les nations, les cultures, toute l'œuvre de Herder consiste à mettre en relation, à rassembler " la voix du peuple, de l'humanité disséminée ". Ne cessant de rapporter les époques et les langues les unes aux autres, Herder développe une philosophie de la traduction. Dans l'horizon intellectuel de la fin du XVIIIe siècle, c'est bien chez lui plutôt que chez Voltaire, Goethe ou Kant que se produisent et une libération et une crise de la langue.