Célèbre pour ses écrits de fiction, Rudyard Kipling, prix Nobel de littérature 1907, fut aussi le héros-narrateur d'un grand nombre de reportages et sûrement le plus excentrique écrivain-voyageur de son temps. Ce volume, composé de plusieurs recueils de reportages et de chroniques destinés aux deux publications indiennes auxquelles il collabora entre 1882 et 1889, révèle une part méconnue de son oeuvre à laquelle il se consacra dès sa jeunesse.
Les Lettres de marque racontent un voyage au Rajputana en 1887. Kipling y déploie sa verve inimitable, celle que connaissent et apprécient les lecteurs des Simples contes des collines, avec, en supplément, une touche de réalisme souvent très cru. Les Lettres du Japon sont issues d'une exploration quasi ethnologique de l'envoyé spécial du Pioneer au pays du Soleil-Levant, lors du long périple qui le ramène en Angleterre à l'automne 1889. Kipling fera aussi étape en Amérique. Dans la série de chroniques baptisées Lettres aux Américains, il rivalise d'impertinence avec le Dickens des Notes américaines, composées un demi-siècle auparavant. Enfin, le recueil publié en France en 1922 sous le titre Lettres de voyage rassemble trois " dossiers " où se mêlent les impressions de l'écrivain relatives aux différents pays qu'il a traversés depuis son départ de l'Inde et au voyage aussi politique que touristique qu'il a effectué avec son épouse en 1913 sous le soleil d'Égypte.
C'est un Kipling affranchi des idées reçues sur le colonialisme qui s'exprime dans ces textes, démentant ainsi la légende du " chantre de l'impérialisme britannique ". Si " l'Est et l'Ouest ne se rencontreront jamais ", l'un et l'autre ont pourtant beaucoup à se dire.