Outre la qualité des albums et des concerts, ce qu'il y a de plus
impressionnant, c'est la gigantesque influence que le groupe a
généré et génère encore, plus de trente ans après sa formation.
The Clash est un groupe mythique. Mais derrière le mythe se
cache une histoire " ordinaire " qui, débarrassée du strass et des
paillettes, révèle une réalité se situant aux antipodes des clichés
rock. The Clash n'est pas le groupe vengeur venu sauver l'humanité
grâce à sa puissance et à ses discours politiques carabinés.
The Clash n'est pas la solution sociale au conflit des générations
et aux endoctrinements fascistes et racistes. Il n'y a pas
de génie dans le groupe, il n'y a pas de guitar hero ou autre personnalité
" investie par des forces ou des voix venues
d'ailleurs ". Il n'y a pas de destin sulfureux embourbé dans la
drogue et le scandale.
Les différentes biographies réalisées jusqu'alors sur The Clash
n'ont fait qu'entretenir, voire grossir, un mythe auquel personne
ne semble vouloir s'attaquer de front. L'histoire de ce
groupe est truffée de mensonges délibérément créés et véhiculés
par le quatuor lui-même, mais aussi par son manager et un grand
nombre de journalistes. Nombreux sont les voiles à lever.
Nombreuses les vérités à rétablir.
Pour ce faire, l'auteur a choisi de rencontrer " ceux " qui ont
approché, suivi, voire vécu un temps aux côtés des " Quatre de
Camden " : Nick Kent, Bruno Blum, Patrick Eudeline, F.J.
Ossang, Antoine de Caunes, etc.
Avec lucidité, loin de succomber à la pure admiration, Jean-
Philippe Gonot, parle d'un groupe qui, dès ses premières
compositions, s'emmêlera les pinceaux entre rêve et utopie,
entre élan révolutionnaire et circuit imposé par les grosses
firmes, entre intégrité et popularité. Un groupe au discours
médiatique calculé et préparé, ne lésinant sur aucune " révision
" concernant l'histoire et le parcours de chacun de ses
membres. Un groupe fabriqué, préfabriqué, au sein duquel
chaque protagoniste sera recruté selon des critères très précis,
tout comme ces boys bands qui viendront pourrir la scène musicale
européenne du milieu des années 1990.
The Clash, c'est l'histoire d'une réalité tangible faite de paradoxes
et d'impasses. Celle d'un vertige mêlant sans relâche les méandres à
l'envol, les crises existentielles et idéologiques à la rage infaillible.
Une histoire nourrie de ses propres conflits, de ses caprices, de ses
ratés, de sa puérilité, de son arrogance parfois aveugle, de tout ce
qui fait d'une personne un être plein et entier. " Une personne ", car
The Clash, malgré les nombreuses discordes internes, c'est un état
d'esprit. Une union créatrice entre quatre personnages, quatre personnalités,
quatre combattants portant les mêmes armes ; des six cordes et
des cymbales, des tripes et des mots : Joe Strummer, Mick Jones,
Paul Simonon et Topper Headon.
Jean-Philippe Gonot met en évidence les impasses, les contradictions,
les conflits entre les membres, mais aussi entre des notions
comme celles de popularité et d'intégrité, de " combat rock " politique
et de " règles économiques ".
Très différent de ceux-ci jusqu'ici consacrés au groupe, ce livre
démontre avec lyrisme qu'il y a quelque chose d'inévitable dans
l'aventure de The Clash, quelque chose frôlant l'absolu. Quelque
chose qui dépassera à jamais ses quatre principaux acteurs ; l'idée peutêtre
que, à certains moments, l'Histoire vous choisit.
JEAN-PHILIPPE GONOT est né en 1973 en Bourgogne. Il est compositeur,
chanteur et guitariste au sein de plusieurs formations rock, dont le
groupe Commissaire Juve. (http://commissairejuve.com).
Son premier livre, Teraphosa (Rafael de Surtis), illustre cette rencontre
entre les mots et la musique, avec la scène rock comme toile de fond.
Il est également l'auteur de Morganae Mane (Rafael de Surtis) et
d'une monographie musicale, Têtes Raides (collection " Poésie et
Chansons ", Seghers, 2006), consacrée à un groupe qui, en vingt ans de
concerts, douze albums et près d'un million de disques vendus, a allègrement
chamboulé la chanson française. Il prépare actuellement un
album de BD consacré au groupe Noir Désir.