En bengali, le mot « enfance » signifie d'emblée « enfance d'un garçon ». Tout un symbole, dont on comprendra la portée en se plongeant dans ce livre où l'auteur de Lajja fait revivre ses premières années. Des parents mariés par leur famille... et désunis. Un père despotique au foyer, passant le plus de temps possible auprès de sa maîtresse. Une mère, fille d'imam, réfugiée dans une dévotion religieuse austère... En un sens, c'est un tableau ethnologique de la famille traditionnelle bengalie que nous propose Taslima Nasreen. Un tableau auquel le regard de l'écrivain - et de la petite fille - apporte vie et chaleur. Dans un pays déchiré par la guerre civile, nous voyons naître et s'affirmer un caractère rebelle, auquel le père apportera une aide paradoxale en imposant à ses enfants, y compris aux filles, de faire des études. On sent ici comme une gourmandise de l'auteur à rappeler son enfance, à en retrouver les saveurs, le langage vif et leste. Avec ce livre, le premier écrit en exil, Taslima Nasreen prouve avec force qu'elle est un véritable écrivain.