Lire L'Enfant noir c'est emprunter les sentes de l'initiation, c'est décrypter les codes d'une société, de tout un peuple. On en sort ébloui, surpris d'être entré dans un univers de personnages humbles, dépositaires d'une culture de la courtoisie, de l'échange et de la dignité...
Si dans L'Enfant noir l'écrivain guinéen s'imaginait ne penser qu'à lui, tracer les contours de sa " Haute-Guinée natale ", c'est pourtant un chant universel qui en est sorti. [...] Seul en Europe, détaché de sa famille, il se consolait avec les mots. Et le soir, la main tremblante, le coeur serré par la nostalgie, il devait retrouver sa terre natale, la clameur des forgerons provenant de l'atelier de son père, la voix rassurante d'un de ses oncles. Il retrouvait aussi ses camarades de jeu, ceux avec lesquels il passa la dure épreuve de la circoncision, décrite dans son récit. Il y avait l'Amour, sujet plus que tabou, avec la silhouette de sa bien-aimée Marie :
" Mon oncle nous laissait son phono et ses disques, et Marie et moi dansions. Nous dansions avec infiniment de retenue, mais il va de soi : ce n'est pas la coutume chez nous de s'enlacer ; on danse face à face, sans se toucher ; tout au plus se donne-t-on la main, et pas toujours. Dois-je ajouter que rien ne convenait mieux à notre timidité ? " Alain Mabanckou