Cruauté surréaliste et ironie burlesque caractérisent ce conte hongrois où les personnages semblent sortis d'une BD de Bilal.
Gabriel Ventuza arrive à Bogdanski Dolina avec pour mission de racheter aux fossoyeurs la dépouille mortelle de son père, Victor, passeur qui fut assassiné plusieurs années auparavant et qu'on dit avoir été enterré au cimetière arménien.Bogdanski Dolina est un bourg des montagnes ukrainiennes qui n'offre d'autres curiosités que la tombe du Voyageur inconnu, la monumentale décharge d'ordures, et Isolda, un camp de baraquements, où toutes sortes de "malades et autres personnes indésirables" sont gardés. Bogdanski Dolina est un lieu dont on pense à repartir avant même d'y être arrivé...À son arrivée, succombant à l'engourdissement provoqué par les odeurs pestilentielles du dépôt d'ordures, Gabriel Ventuza s'endort à la gare. Il n'en sortira que cinq jours plus tard grâce au narrateur du livre qui le trouve étendu nu sur une brouette. Le narrateur le conduit chez sa mère, qui lui décroche un poste d'aumônier à Isolda et lui offre de loger chez elle.Mais avec son maigre traitement, Gabriel est dans l'impossibilité d'accomplir sa mission. Une commande inespérée se présente bientôt: un riche négociant lui demande de sortir d'Isolda deux sœurs, de leur faire passer clandestinement la frontière et de les remettre entre les mains de leur cousin, Boga Schenkowitz. Mais épouvanté par l'odeur et l'aspect des sœurs qui ont séjourné au cœur de la décharge après leur évasion, Boga renonce à les reprendre.Gabriel se retrouve de nouveau sans un sou. Il ramène donc les sœurs à Isolda, où il touche la récompense promise à celui qui retrouverait les fugitives. Là, les sœurs sont enfermées dans une cage à poules et lapidées par les autres prisonniers. Prisonniers qui eux-mêmes, tous les soirs, sont bombardés de pierres par les membres du clergé.Car la ville est tenue par les religieux. Le temps s'y mesure à la succession des archevêques qui séjournent régulièrement à Bogdanski Dolina. L'existence elle-même est placé sous le signe du totalitarisme: il n'y a rien à quoi l'on puisse se référer. La nature récupère les vestiges de la culture, les chemins ne mènent nulle part, les individus disparaissent sans laisser de trace. La vie est un labyrinthe dont on ne peut s'échapper. Ainsi, Gabriel parvient à récupérer le corps de son père. Alors qu'il est prêt à partir, les notables religieux de la ville sont assassinés, un officiel débarque pour s'occuper des funérailles. Gabriel se rend alors compte qu'on ne lui a pas remis la bonne dépouille et que le nouveau venu n'est autre que son demi-frère...