Ça commence sur une plage d’été, bondée, du temps on y allait en foule, avec ses criailleries, sa torpeur d’ennui trompé en masse. Tout va bien, comme toujours. Vers six heures, deux coups de vent - les ballons qui s’envolent, les piquets et fanions qui sifflent, les nappes des paillotes qui se soulèvent. Et puis, rien. Deux heures plus tard, c’est la Rafale. Tout le sable soulevé. Jusqu’au dessus de la falaise d’immeubles d’été, jusqu’aux parkings et routes où fuiront, après le souffle qui a tout aspiré, les marées de voitures en panique. Dans les bars, les rues, les halls d’hôtels, les gens se sont engouffrés, n’entendant même pas que leurs cris ne résonnaient plus qu’en eux. C’était comme un écho qui aurait siphonné le son, se dira-t-on plus tard. Et certains, les uns partis vers les dunes et d’autres réfugiés dans une villa abandonnée, sont assez loin de tout ça pour remarquer que le ciel paraît se tendre inexorablement, lisse, en rideau peu à peu tiré vers un fond qui là-haut s’éclaire jusqu’à l’aube, comme si apparaissait l’espace derrière… derrière le ciel, pour le dire à l’humaine. Pendant ce temps, bien sûr, les êtres continuent leurs petites intrigues; mais, dépassés, ne comprenant rien à "ce qui arrive", ils communiquent et perçoivent comme jamais.
Un roman de métaphysique-fiction, dans cette veine qu’a inaugurée Jean-Philippe Domecq et qui paraît tirée elle aussi derrière l’horizon par une écriture où l’excès, la faconde captent la nuance avec cet humour subreptice que donne le vertige de l’infini. Infini dont ce récit nous montre que ce n’est encore pas assez.